Au nom de la protection de l’enfance

L’ENFANCE AU COEUR A LU POUR VOUS

Au nom de la protection de l’enfance, par Maurice BERGER

L’auteur, Maurice BERGER, est médecin pédopsychiatre et psychanalyste. Depuis 28 ans, il a la responsabilité d’une équipe de pédopsychiatres. Il est par ailleurs, professeur associé en psychopathologie de l’enfant à la Faculté de psychologie de l’Université Lyon 2.

La première édition de ce livre en 2005 se voulait un fort signal d’alarme sur les risques que le texte de loi sur la protection de l’enfance faisait courir aux enfants concernés. La loi votée en 2016 sur la protection de l’enfant est une meilleure rédaction même si elle reste bien critiquable.

Ce livre passe donc en revue les changements positifs intervenus dans le domaine de la protection de l’enfance depuis la loi 2016. Il met aussi en lumière les failles de ce dispositif législatif.

Il insiste sur l’importance de la parole du juge des enfants et sur la fonction de protection qu’elle se doit d’avoir.

Il a une expression intéressante pour évoquer la subtilité de ce rôle, malheureusement souvent bien mal assumé : « c’est un métier des plus difficile qui soit, qui expose à un tiraillement permanent entre l’identification aux parents et l’identification à ce que ressent l’enfant et à ses besoins ».

Dans une deuxième partie, l’auteur rappelle les enjeux, à savoir les risques de déficience intellectuelle et d’incapacité d’apprendre, de même que des troubles psychiques graves pour des enfants soumis précocement à un milieu éducatif très inadéquat. D’après l’auteur « le dispositif de protection de l’enfance ne doit pas se centrer uniquement sur les traumatismes « visibles ».

Dans sa partie centrale, l’auteur aborde longuement les errements des professionnels de l’enfance, qui viennent compliquer et parfois anéantir la protection de l’enfant qu’ils sont censés assurer.

A partir de cas précis énumérés en début de chapitre, l’auteur dénonce l’inexactitude de certaines affirmations ou préjugés de la part de ces professionnels.

Maurice Berger revient longuement sur le concept d’enfant en danger que la loi de 2016 perpétue en lieu et place d’une référence qui aurait été bien plus claire, à savoir celle d’enfant maltraité. Cette référence insuffisante et ambigüe aboutit à deux difficultés : dans certains cas une « forte sacralisation du lien parent-enfant » qui peut amener à  des décisions judiciaires créant un danger pour l’enfant dans le but d’éviter à tout prix de le séparer de ses parents. Dans d’autres cas au contraire, un retrait de l’enfant de sa famille pour des motifs tout à fait insuffisants – puisque seule la maltraitance devrait être un cas impératif de placement de l’enfant.

Selon M. BERGER, il n’est pas exact de croire qu’une modification de la loi à cet égard induirait des changements trop onéreux, car l’auteur rappelle que « l’inadéquation de certaines décisions judiciaires entraine des coûts faramineux quand un enfant devient un adulte dépendant à vie de la société ».

L’auteur rappelle que dans d’autres pays, on fait évoluer régulièrement la loi et les pratiques en fonction des connaissances au profit d’une meilleure prise en compte de l’intérêt de l’enfant.

L’auteur évoque une autre problématique, même en supposant l’implication des éducateurs, travailleurs sociaux, inspecteurs, psychologues, il existe une grande hétérogénéité de fonctionnement d’un département à l’autre ou dans un même département.

Alors que des progrès sont réalisés dans le repérage des situations de maltraitance physique  et d’abus sexuels, il s’avère que la gravité de l’atteinte intellectuelle et affective subie par l’enfant soit fréquemment sous-évaluée et sa protection très aléatoire.

Maurice Berger rappelle que le développement affectif et intellectuel d’un enfant est préservé dans la mesure où certains objectifs précis sont atteints tels que la capacité d’apprentissage, l’adaptation à la vie en groupe, une relation positive avec ses parents. Pour atteindre ces objectifs, une aide à la parentalité peut être envisagée, en fonction de chaque cas.

La troisième partie du livre est consacrée au rôle majeur de « pilotage » du juge des enfants.

« Le positionnement des juges et une loi cohérente sont la clé de voûte du dispositif de protection de l’enfant ». L’auteur souligne que « des exigences plus ou moins grandes de la part des magistrats découle la manière de travailler de milliers de professionnels et le destin de centaines de milliers d’enfants ».

(A cet égard L’ENFANCE AU CŒUR a eu mille fois l’occasion de rappeler combien il est néfaste qu’un juge des enfants se contente, comme c’est souvent le cas, d’entériner les rapports sociaux !)

Dans sa postface, le livre revient sur les failles du projet de loi de 2007, rappelant que « dans des cas de graves défaillances éducatives aucun axe directeur cohérent n’est fixé pour la prise en charge de ces situations ». Il met toutefois les « fragiles avancées de la loi » et en effet, la loi de 2016 n’a pas résolu, loin s’en faut, tous les problèmes.

Ce livre très complet permet donc de constater les changements positifs apportés par la loi de 2016 sur la protection de l’enfant, mais il révèle aussi toutes les problématiques que cette loi a ignorées.

Le chemin est encore bien long avant que la protection de l’enfance soit opérationnelle et satisfaisante en France.

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