La Cour de cassation déclare le placement à domicile (PEAD) contraire à la loi

L’ENFANCE AU COEUR a une mauvaise nouvelle à annoncer : la Cour de cassation vient de déclarer le placement à domicile contraire aux textes (pourvoi en cassation du département accueilli, arrêt de la Cour d’appel validant un placement à domicile cassé).

Rappelons que le placement à domicile (« PEAD ») est un placement à l’ASE qui s’exécute à domicile, une solution que les juges mettent en place en accord avec l’ASE depuis fort longtemps et qui est souvent la fin d’une grande souffrance pour les enfants et la famille, en attendant la mainlevée complète du placement. Il présente une alternative créative, et permet une meilleure adhésion des familles à la mesure de placement.

Ce type de placement représentait 14% des capacités d’accueil de l’ensemble des structure de l’ASE en 2021. Selon la Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques (Drees), cela concernait près de 15.000 accompagnements en 2022 avec « une progression sensible au cours des dernières années« .

Nous avions tous conscience que cette forme de placement, qui palliait souvent le manque de places en famille d’accueil ou en Foyer était assez bâtarde, même sa nature juridique interrogeait.
En effet qui était responsable de l’enfant sur le plan de la responsabilité civile ? Comment expliquer que s’il y avait danger au point de confier un enfant à l’ASE, ce danger paraissait disparaître par magie puisque le placement était « at home » ?!
Récemment, en février 2024, la Cour de cassation avait rendu un avis, disant que ce placement à domicile avait la nature d’une AEMO.
Cet avis nous avait intrigués … nous sentions que quelque chose n’allait pas et que ce placement à domicile déplaisait à quelqu’un et avait peut-être des jours comptés. C’est chose faite puisque par un arrêt de la première Chambre civile de la Cour de cassation du 2 octobre 2024 (références 21-25 974) cette pratique est déclarée contraire à la loi et évidemment les juges des enfants ne prescriront plus ce qui était pourtant un moindre mal … une solution humaine accueillie avec soulagement – même si elle n’était guère orthodoxe.
Espérons que certains juges des enfants et Cours d’appel sauront se montrer courageux et avoir un esprit pratique sur une mesure qui fonctionnait relativement bien.

Mais est-il tellement orthodoxe d’attaquer la vie des familles comme le font juges et services sociaux, ceci est une autre histoire. Remarquons que c’est bien le département des Hauts de Seine, qui est allé jusqu’en cassation pour obtenir ce résultat – rien d’étonnant.
Le système du placement à l’ASE est donc renforcé et verrouillé, contrairement à la logique, qui voudrait que les juges des enfants voient leur arsenal renforcé, pour disposer de plusieurs cordes à leur arc. Va t’on assister à une résurgence des AEMO dites ‘renforcées’ qui ressemblaient en pratique aux PEAD.

Nous précisons que certains juges, qui sentent le vent tourner, utilisent depuis un certain temps l’expression « placement à l’ASE avec droit d’hébergement permanent au profit des parents » pour nommer différemment le placement à domicile … nous croisons les doigts pour que cette astuce ne tomber pas à l’eau désormais.
Triste jour pour l’assistance éducative, triste jour pour les familles et les enfants.

Par Christine Cerrada & Franz Achache

-> Télécharger la décision de la Cour de cassation ici : cass.-civ.-1re-2-oct.-2024-n-21-25.974-25672-241018-0829
@Franz Achache

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